Nostra : L'actualité
insolite N° 516 du 25 fév. au 3 Mars 1982
Les dossiers de
Nostra : LE CORAN
Dans notre numéro 501 du 12 Novembre
dernier, nous inaugurions avec la Bible une nouvelle
série de dossiers consacrée aux grands livres ayant
changé l'histoire du monde ou ayant profondément
marqué l'histoire mystérieuse. Après les textes sacrés des Mayas, du moins ceux qui ont échappé à
la destruction et ont pu parvenir jusqu'à nous, comme
le Popol-Vuh (n°
506 du 17 Décembre 81), après
les Livres des
morts (n° 513 du 4 Février 82), voici le Coran, livre important s'il en est puisqu'il constitue
la pierre angulaire de la religion professée par les 648
millions de musulmans recensés à travers le monde. ( Note du Webmaster : ce nombre évolue sans cesse et évidemment n'est plus le même actuellement ).
L'islam
politique a surgi comme l'un
des phénomènes les plus importants de notre temps,
a écrit Paul-Marie
de La Gorce. Il traduit à
la fois une influence grandissante de la religion musulmane dans
le monde et le fondement de l'action politique, ou même
l'organisation des Etats, sur les plus anciennes sources religieuses,
et par conséquent culturelles et sociales, des nations
islamiques.
Une
réaction contre les valeurs occidentales
En effet, ce n'est pas l'une
des moindres surprises de la période que nous vivons que
de voir des pays comme l'iran, le Pakistan et la Libye, pour
ne citer qu'eux, tourner le dos à ce que l'on croyait
une évolution inéluctable pour en revenir à
la loi coranique. Mais ce retour aux sources ne constitue pas
simplement comme on le croit (et comme le sont réellement, il ne faut pas
le nier, des pratiques critiquables comme les mutilations juridiques
par exemple) un retour en arrière,
un refus du monde moderne. Il s'agit d'une réaction parfois
saine contre des valeurs occidentales importées à
l'époque coloniale et qui, si elles ont été
très souvent vectrices de progrès, n'ont pas toujours
su répondre aux aspirations des peuples.
"L'islam
n'est pas que l'une des trois religions monothéistes,
soutient le sociologue arabe Anouar Abde-Malek, auteur de plusieurs ouvrages fondamentaux comme
idéologie et renaissance nationales. . L'islam s'est structuré
au cours de l'histoire - à partir du second siècle
de son existence, c'est-à-dire du IXe siecle - en une
civilisation universelle s'étendant de Poitiers
et de l'Andalousie, aux rives orientales de l'Asie, englobant
ainsi une immense variété de cultures, de nations
et de groupes ethniques d'Europe méridionale, d'Afrique
du Nord, d'Afrique centrale et mériodionale jusqu'aux
confins du Sud-Est asiatique."
En effet, quand nous pensons
à l'islam, nous sommes trop souvent enclins à fausser
notre jugement en fonction de notre passé historique.
Les guerres de Charlemagne contre les Sarrasins dont la Chanson
de Roland nous a bercés, la reconquête de l'Espagne,
les croisades du IXe au XVe siécle, puis au siècte
dernier la colonisation de l'Afrique du Nord nous ont incités
à penser au seul monde araboberbère quand nous
évoquons l'islam. En réalité, si cet univers
arabe fut le creuset dont est sortie l'ummah, la communauté
des croyants, son centre de gravite s'est singulièrement
déplacé. Ainsi, on dénombre aujourd'hui
125 millions de fidèles en Indonésie, 80 millions
en Inde, 76 millions au Bangladesh, 75 millions au Pakistan,
50 millions dans l'Union soviétique officiellement athée,
40 millions en Turquie, 30 millions au Nigeria et 4 millions
en Yougoslavie, tous pays qui ne sont pas arabes. En France même,
comme nous le signalions dans un récent dossier sur les
grandes religions pratiquées dans notre hexagone, on recense
deux millions de musulmans, plus que de protestants et d'israélites
(n° 509
du 7 janvier dernier). Or, c'est
le Coran qui est le lien entre des groupes historiquement et
ethniquement si disparates. Religion monothéiste
rappelons-le, l'islam affirme avant tout l'unicité de
Dieu, Allah. Il rejette l'idée d'un peuple élu
et du dualisme de la nature et de la grâce, contrairement
à l'hébraïsme, et, à l'inverse du christianisme,
il refuse la notion de Trinité et d'Incarnation.
Le fidèle doit croire aux archanges,
créatures de lumière. Le plus important est Djibraïl,
appelé aussi l'Esprit Saint, messager de la parole divine.
Viennent ensuite Mikhail (Michel), chargé des biens de ce monde, Azraïl,
l'ange de la mort, et lsrafil qui sonnera la trompette du Jugement
dernier. Parmi les prophètes, on doit distinguer les nabi
(avertisseurs) : Npé,
Loth, ldriss, Salih, Rûd, David, Elie et Elisée;
des rasûl (messagers)
: Abraham, Moïse,
Jésus et Mahomet.
Jésus est certes un prophète, mais non pas le messie,
quoique procédant du surnaturel. Les musulmans reprochent
aux chrétiens d'affirmer qu'il est le Fils de Dieu, alors
que, pour eux, il n'est qu'Esprit de Dieu. Par ailleurs, disent-ils,
il n'est pas mort sur la croix, Dieu lui ayant substitué
une autre forme, quand il le rappela au ciel. De tous les prophètes
messagers, le plus important est le dernier, Mahomet, surnommé
le "Sceau
des prophètes"
car il rétablit une révélation déjà
donnée aux hommes par Dieu, mais déformée
par les juifs et les chrétiens ( le nom du prophète
signifie le Loué, il vient du participe passé du
verbe hamada . La transcription, la plu exacte serait
Mohammed ou mieux, muhammed . Toutefois la tradition occidentale
en a fait Mahomet, nom que nous concervons ici pour
une meilleure comprhension). Le jour
du jugement dernier, les martyrs de la foi et les
prophètes entreront directement au paradis, les autres
devant attendre d'être jugés pour connaître
leur sort : la
Gehenne (l'enfer) ou la Djanna
(le Paradis)
La biographie de ce "Sceau
des prophète" a fait
l'objet de versions diverses car la Sira qui la retrace est plus
anecdotique et symbolique qu'historique. Toutefois, des analyses
critiques ont permis d'en connaître assez bien les grandes
lignes. Orphelin très tôt, élevé par
son oncle Abou-Talib, il entra à vingt-cinq ans au service
de la veuve d'un riche marchand, Khadidja, qu'il épousa,
acquérant ainsi une grande aisance. Il avait, dit-on,
l'habitude de s'isoler souvent pour méditer. Un jour du
mois de Ramadan, l'archange Djibraïl (Gabriel)
lui serait apparu, lui disant avec insistance "lqrâ" (récite
). Il se serait alors persuadé
que Dieu l'avait choisi pour "réciter" aux hommes
les révélations qui constitueront le Coran, dont
le nom signifie justement "récitation".
Peu à peu, le noyau de ses fidèles
grandit, mais son influence à La Mecque demeure toujours
plutôt faible. Pensant trouver davantage de partisans à
Yathrib, il part pour cette ville qui, désormais,
portera le nom de Médine
(Mâdinat
an-Nâbi = la ville du Prophète), le 12
râbi (24 septembre) de l'an 622, (le 13 Déc. 2007, l'aimable internaute Jean-Pierre S.., nous a proposé la date du 16 Juillet 622 ).
Cette date constituera le point de départ de l'ère
dite de l'Hégire, mot souvent mal traduit dans les dictionnaires
par "fuite" , mais qui signifie plutôt "expatriation" .
Après
de multiples avatars sur lesquels nous passerons très
vite, Mahomet réussit a revenir à La Mecque, constituant
un Etat théocratique non sans devoir guerroyer farouchement.
A sa mort, le 13
râbi an 10
(8 juin 632), l'islam était déjà devenu une
force.
"Récitation", donc, le Coran doit être considéré
comme l'uvre de Dieu et non pas de Mahomet lui-même
On ne sait pas exactement quand il fut rédigé,
mais il est certain que ce fut avant l'Hégire car
des témoignages en font état huit ans avant cet
événement. Concrétement, le texte
coranique se compose de cent quatorze sourates
( d'un nom arabe signifiant
chapitre) composées d'un nombre
variable de versets (288
pour la sourate 2, tandis que la sourate 108 n'en a que 3)-
Les diverses sourates
furent écrites sur des supports hétéroclites,
le papier n'existant pas à cette époque. Certaines
furent rédigées sur des omoplates de chameaux,
d'autres sur des pierres blanches ou des planchettes de bois,
ou encore des poteries et des morceaux de parchemin. Mais le
Prophète se contentait de dicter, et ce sont ses premiers
compagnons qui transcrivaient, en particulier son scribe Zaïd idn Thâbit, mais d'une manière fragmentaire. Car les
croyants apprenaient les révélations par cur
(A la mort du prophète,
on dit que plusieurs membres de la tribu médinoise des Ansar, dont une femme , connaissaient le Coran par
cur. On les appelait du terme des Hâfis et ce terme , devenu un nom propre
, confère à celui qui le porte une
sorte de noblesse de l'islam)
.
Le plus ancien Coran, tel que nous le connaissons,
est ce qu'on appelle la "vulgate uthmanienne" dont le texte fut compilé sur l'ordre
du calife Uthmân
ihn Affân entre 632 et
656, de façon à posséder une version définitive
ne permettant plus les hérésies. Dans cette vulgate,
à l'exception de la Fâtiha, l'acte
de foi, placée en tête de l'ouvrage, les sourates
sont classées par ordre décroissant de longueur.
Il semble sûr que l'ordre des versets à l'intérieur
des sourates soit dû à Mahomet lui-même, Mais
la question reste posée pour l'ordre des sourates. Certains
estiment que c'est une initiative du scribe Zaïb
tandis que d'autres, comme l'Imân MâIik,
par exmple croient que c'est l'uvre du Prophète
lui-méme. Quoi qu'il en soit, la version la plus
ancienne de la vulgate uthmanienne, à partir de laquelle
ont été établis les autres textes, remonte
a l'an 154 de l'Hégire, soit 776 do notre ère.
Telle est l'orgine de ce livre qui est tout
à la fois l'exposé de ta doctrine et un code religieux,
éthique juridique et social. Mais on peut regretter que,
malgré son importance, il soit beaucoup trop méconnu
en Occident. "Monument
littéraire et artistique d'une étonnante richesse
poétique, stylistique et lexicographique, le Coran a exercé
depuis treize siécles une étrange fascination sur
l'esprit d'un nombre considérable d'hommes de toute origine,
écrit à ce sujet Toufic Fahd Il paraît être
le dernier témoin d'une antique tradition sémitique
où l'imagerie s'allie au réalisme, où le
verbe engendre la magie de l'expression et où le physique
est transfiguré par le métaphysique."
Ajoutons pour
achever ce dossier que, contrairement à une idée
reçue et contrairement aux mauvaises interprétations
qui en sont parfois données, méme dans certains
pays musulmans, le Coran est un livre progressiste préconisant
la libération des humbles et de opprimés. Et s'il
fulmine contre tes idolâtres et les athées, il reconnaît
des droits aux "gens du Livre", ceux qui ont reçu
un livre révélé et plus pratîculiéremont
les juifs et les chrétiens. En effet, quand nous pensons
à l'islam, nous sommes trop souvent enclins à fausser
notre jugement en fonction de notre passé historique.
Les guerres de Charlemagne contre les Sarrasins dont la Chanson de Roland nous a bercés, la reconquête de l'Espagne,
les croisades du IXe au XVe siécle, puis au siècte
dernier la colonisation de l'Afrique du Nord, nous ont incités
à penser au seul monde araboberbère quand nous
évoquons l'islam. En réalité, Si cet univers
arabe fut le creuset dont est sortie l'ummah, la communauté
des croyants, son centre de gravite s'est singulièrement
déplacé. Ainsi, on dénombre aujourd'hui
125 millions de fidèles en Indonésie, 80 millions
en Inde, 76 millions au Bangladesh, 75 millions au Pakistan,
50 millions dans l'Union soviétique officiellement athée,
40 millions en Turquie, 30 millions au Nigeria et 4 millions
en Yougoslavie, tous pays qui ne sont pas arabes. En France même,
comme nous le signalions dans un récent dossier sur les
grandes religions pratiquées dans notre hexagone, on recense
deux millions de musulmans, plus que de protestants et d'israélites
(n° 509
du 7 janvier dernier). Or, c'est
le Coran qui est le lien entre des groupes historiquement et
ethniquement si disparates. Religion monothéiste
rappelons-le, l'islam affirme avant tout l'unicité de
Dieu, Allah. Il rejette l'idée d'un peuple élu
et du dualisme de la nature et de la grâce, contrairement
à l'hébraïsme, et, à l'inverse du christianisme,
il refuse la notion de Trinité et d'Incarnation.
Le fidèle doit croire aux archanges,
créatures de lumière. Le plus important est Djibraïl,
appelé aussi l'Esprit Saint, messager de la parole divine.
Viennent ensuite Mikhail (Michel), chargé des biens de ce monde, Azraïl,
l'ange de la mort, et lsrafil qui sonnera la trompette du Jugement
dernier. Parmi les prophètes, on doit distinguer les nabi
(avertisseurs) : Npé,
Loth, ldriss, Salih, Rûd, David, Elie et Elisée;
des rasûl (messagers)
: Abraham, Moïse,
Jésus et Mahomet.
Jésus est certes un prophète, mais non pas le messie,
quoique procédant du surnaturel. Les musulmans reprochent
aux chrétiens d'affirmer qu'il est le Fils de Dieu, alors
que, pour eux, il n'est qu'Esprit de Dieu. Par ailleurs, disent-ils,
il n'est pas mort sur la croix, Dieu lui ayant substitué
une autre forme, quand il le rappela au ciel. De tous les prophètes
messagers, le plus important est le dernier, Mahomet, surnommé
le "Sceau
des prophètes"
car il rétablit une révélation déjà
donnée aux hommes par Dieu, mais déformée
par les juifs et les chrétiens ( le nom du prophète
signifie le Loué, il vient du participe passé du
verbe hamada . La transcription, la plu exacte serait
Mohammed ou mieux, muhammed . Toutefois la tradition occidentale
en a fait Mahomet, nom que nous concervons ici pour
une meilleure comprhension). Le jour
du jugement dernier, les martyrs de la foi et les
prophètes entreront directement au paradis, les autres
devant attendre d'être jugés pour connaître
leur sort : la
Gehenne (l'enfer) ou la Djanna
(le Paradis)
La biographie de ce "Sceau
des prophète" a fait
l'objet de versions diverses car la Sira qui la retrace est plus
anecdotique et symbolique qu'historique. Toutefois, des analyses
critiques ont permis d'en connaître assez bien les grandes
lignes. Orphelin très tôt, élevé par
son oncle Abou-Talib, il entra à vingt-cinq ans au service
de la veuve d'un riche marchand, Khadidja, qu'il épousa,
acquérant ainsi une grande aisance. Il avait, dit-on,
l'habitude de s'isoler souvent pour méditer. Un jour du
mois de Ramadan, l'archange Djibraïl (Gabriel)
lui serait apparu, lui disant avec insistance "lqrâ" (récite
). Il se serait alors persuadé
que Dieu l'avait choisi pour "réciter" aux hommes
les révélations qui constitueront le Coran, dont
le nom signifie justement "récitation".
Peu à peu, le noyau de ses fidèles
grandit, mais son influence à La Mecque demeure toujours
plutôt faible. Pensant trouver davantage de partisans à
Yathrib, il part pour cette ville qui, désormais,
portera le nom de Médine
(Mâdinat
an-Nâbi = la ville du Prophète), le 12
râbi (24 septembre) de l'an 622.
Cette date constituera le point de départ de l'ère
dite de l'Hégire, mot souvent mal traduit dans les dictionnaires
par "fuite" , mais qui signifie plutôt "expatriation"
Après
de multiples avatars sur lesquels nous passerons très
vite, Mahomet réussit a revenir à La Mecque, constituant
un Etat théocratique non sans devoir guerroyer farouchement.
A sa mort, le 13
râbi an 10
(8 juin 632), l'islam était déjà devenu une
force.
"Récitation", donc,
le Coran doit être considéré comme l'uvre
de Dieu et non pas de Mahomet lui-même. On ne sait pas
exactement quand il fut rédigé, mais il est certain
que ce fut avant l'Hégire car des témoignages en font état huit
ans avant cet événement. Concrétement,
le texte coranique se compose de cent quatorze sourates
( d'un nom arabe signifiant
chapitre) composées d'un nombre
variable de versets (288
pour la sourate 2, tandis que la sourate 108 n'en a que 3)-
Les diverses sourates
furent écrites sur des supports hétéroclites,
le papier n'existant pas à cette époque. Certaines
furent rédigées sur des omoplates de chameaux,
d'autres sur des pierres blanches ou des planchettes de bois,
ou encore des poteries et des morceaux de parchemin. Mais le
Prophète se contentait de dicter, et ce sont ses premiers
compagnons qui transcrivaient, en particulier son scribe Zaïd idn Thâbit, mais d'une manière fragmentaire. Car les
croyants apprenaient les révélations par cur
(A la mort du prophète,
on dit que plusieurs membres de la tribu médinoise des Ansar, dont une femme , connaissaient le Coran par
cur. On les appelait du terme des Hâfis et ce terme , devenu un nom propre
, confère à celui qui le porte une
sorte de noblesse de l'islam)
.
Le plus ancien Coran, tel que nous le connaissons,
est ce qu'on appelle la "vulgate uthmanienne" dont le texte fut compilé sur l'ordre
du calife Uthmân
ihn Affân entre 632 et
656, de façon à posséder une version définitive
ne permettant plus les hérésies. Dans cette vulgate,
à l'exception de la Fâtiha, l'acte
de foi, placée en tête de l'ouvrage, les sourates
sont classées par ordre décroissant de longueur.
Il semble sûr que l'ordre des versets à l'intérieur
des sourates soit dû à Mahomet lui-même, Mais
la question reste posée pour l'ordre des sourates. Certains
estiment que c'est une initiative du scribe Zaïb
tandis que d'autres, comme l'Imân MâIik,
par exmple croient que c'est l'uvre du Prophète
lui-méme. Quoi qu'il en soit, la version la plus
ancienne de la vulgate uthmanienne, à partir de laquelle
ont été établis les autres textes, remonte
a l'an 154 de l'Hégire, soit 776 do notre ère.
Telle est l'orgine de ce livre qui est tout
à la fois l'exposé de ta doctrine et un code religieux,
éthique juridique et social. Mais on peut regretter que,
malgré son importance, il soit beaucoup trop méconnu
en Occident. "Monument
littéraire et artistique d'une étonnante richesse
poétique, stylistique et lexicographique, le Coran a exercé
depuis treize siécles une étrange fascination sur
l'esprit d'un nombre considérable d'hommes de toute origine,
écrit à ce sujet Toufic Fahd Il paraît être
le dernier témoin d'une antique tradition sémitique
où l'imagerie s'allie au réalisme, où le
verbe engendre la magie de l'expression et où le physique
est transfiguré par le métaphysique."
Ajoutons pour
achever ce dossier que, contrairemont à une idée
reçue et contrairement aux mauvaises interprétations
qui en sont parfois données, méme dans certains
pays musulmans, le Coran est un livre progressiste préconisant
la libération des humbles et de opprimés. Et s'il
fulmine contre tes idolâtres et les athées, il reconnaît
des droits aux "gens du Livre", ceux qui ont reçu
un livre révélé et plus particulièrement
les juifs et les chrétiens.
Jean BRUN
Ce dossier était
accompagné des deux encadrés suivants:
Les différentes
traductions
Le Coran
est d'une traduction plus que difficile. Tenter d'en rendre le
rythme expose à trahir le fond, et réciproquement.
C'est pourquoi les bonnes traductions sont rares. Parmi celles
parues en français que les specialistes s'accordent à
trouver bonnes, figurent celle de M. Savary publiée
en 1783, celle de Biberatein
Kasîmirsiki datant de 1840
ainsi que celle, plus récente, de Régis Blachère qui fut un grand orientaliste. Toutefois, l'édition
de 1946 de ce dernier comporte les sourates réarrangées
selon l'ordre chronologique. L' édition de 1957 reprend
l'ordre de la vulgate uthmanienne, mais avec des versets déplacés.
Signalons que Régis Blachère a également
publié, dans la collection "Que sais-je? ", un livre sur le Coran.
Mentionnons également une récente
traduction de Si
Hamza Boubakeur, recteur de l'institut
franco-musulman, ainsi que la traduction effectuée par
Muhammad Hamidullah, professeur à l'université d'Istanbul,
publiée en 1971 par le Club français du livre. C'est à
cette dernière traduction que nous avons emprunté
les passages cités dans ce dossier. Il existe
un très grand nombre de traductions, quelquefois complètes,
mais le plus souvent partielles, depuis celle publiée
an 1647 par un sieur du Ryer. Certaines sont très mauvaises,
péchant par une connaissance approximative de l'arabe
classique. Il en est même de tendancieuses comme la version
française publiée à Lisbonne en 1961 par
une prétendue Fatima-Zaida dans laquelle de très rares parties du Coran,
mal traduites, sont mélangées à d'autres
textes.
Le Coran a été traduit dans
toutes les grandes
langues et même, en tout
ou an partie, dans des langues moins parlées comme le
breton, le basque, le catalan, l'aragonais, le gaélique et le lowlandais d'Ecosse, le laplandais de Norvège, le latvien de Yougoslavie, etc.
Il y eut même en 1951 des morceaux choisis traduits en
volapûk et plusieurs versions en espéranto dont la Nobla Korano du docteur Italo
Chiussi, publiée en 1969
à Copenhague .
L'Arabie avant
Mahomet
On croit généralement à
tort, qu'à l'époque de la révélation.
Arabie était pauvre, un peu dans l'état où
elle se trouvait, il y a peu. avant que l'or noir ne l'enrichisse,
c'est-à-dire un pays désertique peuplé de
nomades vivant chichement de l'élevage.
En réalité, il en allait tout
autrement. Les régions tournées vers l'océan
Indien connaissaient grâce aux moussons une agriculture
florissante. Il en allait de même des oasis du Hedjaz.
sur la façade occidentale. Dés l'Antiquité
vers le IXe siècle avant notre ère, le royaume
de Saba connut la prospérité parle commerce avec
l'Inde. Plus tard, le royaume Hîmyarite, lui aussi, fut
florissant jusqu'à son invasion au IV siècle
de notre ère par les Abyssins.
Au VIIe siècle après Jésus-Christ,
l'Arabie était occupée par des peuples très
divers. Au nord, les Lakhmides et les Gassanides étaient convertis au christianisme sous les
formes hérésiarques nestorienne et monophysite.
Au sud les Arabes proprement dits, descendants d' lsmaël
'l selon la Bible, pratiquaient un monothéisme peu évolué.
"Malgré
les différences qui séparent les cultes mal connus
de l'Arabie du Nord et du Sud, on peut y distinguer un ensemble
de traits communs, écrit l'orientaliste Dominique Sourdel. Il existait ainsi des divinités
locales ou tribales peu individualisées et souvent de
caractère astral, censées résider en des
pierres sacrées (bétyles) certaines semblent avoir été
vénérées dans presque toute l'Arabie telle
al-'Ozzâ(étoile du matin Vénus)
. Les Mekkois honoraient en outre deux déesses. Manaât, déesse du bonheur; et Allât déesse du ciel; au-dessus d'elles se
tenait Allâh
(le Dieu
»), reconnu au Vlle siécle comme le "Seigneur du Temple" (la Ka'ba de la Mekke).
Mais au IVe siècle, chez les semi-nomades de la steppe
syrienne Allâh restait loin derrière les
autres divinités, peut-être commença-t-il
seulement, sous l'influence de croyances étrangères
à prendre la première place."
Ces influences qu' évoque Dominique Sourdel sont celles des minorités de juifs et de chrétiens,
vivant dans la région de la Mekke, dont la religion prépara
leurs voisins au monothéisme prêché par la
suite par Mahomet, le Sceau des prophètes.
Le royaume de la Mekke qui acquit
peu à peu le monopole du commerce, suppanta ses rivaux
de Médîne et de Tâ'if
ce qui contribua au fil des ans à
en faire une capitale religieuse. Le bétyle de la ville,
qui est devenu "la pierre noire" qui, d'après les musulmans, aurait été
remise par un ange à Agar, la mére d'lsmaêl,
était déjà adoré. Il était
conservé dans le bayt, une tente sacrée à proximité
de la source également sacrée de Zamzam.
Cette source, transformée en puits artésien fut
intégrée dans une esplanade sur laquelle fut édifiée
une chambre cubique en pierre, remplaçant le bayt et qui
reçut te bétyle, sans doute au début de
l'ère chrétienne. C'était te lieu du haj
le pélerinage annuel qui est une institution pré-islamique
et reste une obligation de nos jours.
A l'époque de Mahomet, les Mekkois
honoraient essentiellement Hubal, divinité tribale des
Kînâna-Quraysh, prédominants dans la région.
Mais ils rendaient aussi un culte suivi à la triade féminine
al-Uzza, at-Lât et Manât, considérées
comme les filles d'Allâh.
"La
mission de Manomet consistera à redonner sa place de premier et d'unique à Allâh ainsi qu'avaît fait Abraham pour Elohim et Moïse pour
Yahvé, écrit toutefois Toufic Fahd dans la Naissance
de l'islam (histoire
des religions, Encyclopédie de la Pléiade)
Dans l'esprit de Mahomet le monothéisme primitif
des Arabes était indéniable. Il s'agissait d'y
retourner. Mais, depuis l'époque lointaine où
Abraharn et lsmaél avaient construit le temple mekkoîs
pour le culte dAllâh, les Arabes séduits par les
peuples voisins (Chaldéens, Grecs, Romains), ont
associé d'autres divinités à Allâh.
De cette association est sorti tout un système de culte
fondé sur des institutions si profondément ancrées
dans les murs qu'il était ton difficile de les déraciner."
Ajoutons à ce panorama les pratiques
de sorcellerie la croyance aux oracles et à toute sofle
de procédés divinatoires, C'est le terrain sur
lequel Mahomet devait bâtir sa nouvelle religion. (fin des encadrés)
Ce dossier était aussi suivi
des deux textes suivants:
Le coran et
la condition Féminine
L'Islam a souvent été
décrié quant à la portion congrue qu'il
accorde à la femme dans la société. Il est
vrai que, dans de très nombreux pays où cette religion
est majoritaire, même quand elle n'est pas religion d'Etat,
les femmes sont considérées comme des citoyens
de second ordre, voire pire encore. Toutefois, le principal coupable
de cet état de fait éminemment condamnable n'est
pas tant la religion proprement dite que son interprétation
trop rigide, due à des principes moraux ou à des
coutumes bien antérieures à la propagation de l'islam.
Qu'en est-il du Coran lui-même? Certes, il contient des
passages ambigus, mais il est sûr que, à l'époque
où il a été écrit, c'était
en ce sens un ouvrage très progressiste.
Prenons le cas de la polygamie. Elle est
réglée par les versets 2, 3 et 4 de la sourate
4 : " Et donnez
leurs biens aux orphelins; n'y substituez pas le mauvais au bon.
Ne mangez pas leurs biens avec les vôtres: c'est grand
péché vraiment ! Et Si vous craignez de ne pas
être exacts envers les orphelins, eh bien prenez des épouses,
par deux, par trois ou par quatre, parmi les femmes qui vous
plaisent - mais si vous craignez de ne pas être justes,
une seule, ou des esclaves que vos mains possèdent. Cela
afin de ne pas vous aggraver la charge de famille. Et donnez
aux épouses leur salaire d'honneur, comme de droit. Si
de bon gré elles vous en abandonnent quelque chose, consommez-le
alors en bien manger et bien boire."
Muhammad
Hamidullah précise en
commentaire à ces versets : "Si l'on prend les orphelins pour les incorporer
à la famille et qu'une seule femme ne vienne pas à
bout du ménage agrandi, on peut épouser d'autres femmes jusqu'à quatre. On parle ici d'une des conditions
valables de la polygamie. Il est àrappeler que c'est la
première fois qu'une religion a mis des restrictions au
nombre des épouses. Il n'y a aucune restriction de ce
genre dans l'Ancien Testament, ni dans le Nouveau Testament.
Les maîtres protestants, comme Luther, Butzer, Melanchton, etc., ont même déduit le caractère
licite de la polygamie dans le christianisme. Westermarck souligne qu'au temps de Charlemagne même les prêtres chrétiens
pratiquaient la polygamie. Aucune restriction non plus chez les Hindous, les
zoroastriens, etc."
Ajoutons à ce commentaire que les
juifs ne se privaient pas d'avoir plusieurs épouses. C'est
seulement au Xe siècle de notre ère qu'une taqanah, une décision rabbinique, l'a interdit dans
la plupart des pays, les contrevenants étant passibles
du Herm, l'excommunication.
A l'intérieur même du Coran,
on peut voir, au fil des sourates, que les règles de la
polygamie ont changé. Ainsi, dans la sourate 33, l'ange
interpelle le Prophète en ces termes : "Dorénavant, il ne t'est
plus permis de prendre femmes, non plus que de changer d'épouses,
même si leur beauté te plaît à l'exception
des esclaves que ta main possède. Et sur toute chose,
Dieu reste le veilleur."
Il s'agit là d'une allusion à
la vie privée de Mahomet. Quand ce dernier fixa à
quatre le nombre licite des épouses, il en avait déjà neuf. Il proposa donc à certaines d'entre elles
de divorcer, mais aucune ne le voulut. Dans un premier temps,
il se contenta d'en choisir quatre pour avoir avec elles des
rapports sexuels, mais, par souci de justice, il effectua une
sorte de rotation. Plus tard, comme ce subterfuge lui paraissait
indigne de lui et parce qu'il ne voulait pas imposer à
ses disciples une règle qu'il n'aurait pas respectée,
il rédigea cette sourate 33 et s'en tint là.
La notion de salaire d'honneur évoquée
plus haut est également très progressiste pour
l'époque. C'est une somme versée par le mari à
sa femme lors du mariage, dot qu'elle conserve en toute propriété.
Et si le divorce est admis, il est assorti de certaines conditions
restrictives. Bien entendu, il est plus facile pour l'homme que
pour la femme, mais il en allait de même dans le code civil
français jusqu'à une date récente. De plus,
l'épouse peut expressément demander le divorce
si son mari la maltraite ou s'il est impuissant, ce que le code
Napoléon ne reconnaissait pas. De plus, le Coran introduit
la notion de pension alimentaire.
Certes, on trouve dans certaines sourates
des imprécations contre la femme "impure", des
obligations qui restreignent sa liberté, comme le port
du voile dans le verset 31 de la sourate 24: "Et dis aux croyantes qu'elles
baissent leurs regards, et qu'elles gardent leur chasteté,
et qu'elles ne montrent de leurs parures que ce qui en paraît,
et qu'elles rabattent leur voile sur leur poitrine et qu'elles
ne montrent leurs parures qu'à leur mari, ou à
leur père, ou au père de leur mari, ou à
leurs fils, ou aux fils de leur mari, ou à leurs frères,
ou aux fils de leurs frères, ou aux fils de leurs soeurs,
ou à leurs compagnes ou aux esclaves que leurs mains possèdent,
ou aux domestiques mâles qui n'ont pas de désir,
ou aux garçons qui n'ont pas encore puissance sur les
parties cachées des femmes."
Nous sommes bien loin des prescriptions dictatoriales
d'un Khomeiny imposant le port du chador à toutes
les Iraniennes, même non musulmanes. Et de plus. chaque
fois qu'un verset du Coran semble astreignant, il s'en trouve
un autre dont l'interprétation peut conduire à
plus de laxisme. D'autant plus, comme nous l'avons dit précédemment,
qu'il faut considérer l'époque de sa rédaction.
Aujourd'hui, d'une manière plus générale,
l'interprétation de la loi coranique à propos du
mariage conduit à en faire un contrat basé sur
le libre consentement des deux parties. Si un musulman peut fort
bien épouser une femme de la "première religion du Livre ", juive ou chrétienne, l'inverse n'est pas
possible. Mais le musulman, lui non plus, ne peut pas épouser
une athée ou une idolâtre. La polygamie, limitée
à quatre épouses, demeure licite, mais la future
épouse peut faire promettre par contrat à son mari
qu'il s'en abstiendra.
L'adultère est rudement châtié.
"Quant à
celles de vos femmes qui commettent une turpitude, confinez-les
aux maisons jusqu'à
ce que la mort les achève, ou que Dieu leur ouvre une voie", lit-on dans le verset 15 de la sourate 4. Plus loin,
dans le verset 2 de la sourate 24, il est précisé
: "La fornicatrice
et le fornicateur, fouettez-les de chacun cent coups de lanières.
Et que nulle douceur ne vous prenne à leur égard
en la religion de Dieu... Et qu'un groupe de croyants assiste
à leur punition."
Or, la Bible n'est guère plus tendre.
Que l'on se réfère au Deuteronome "Si on n'a pas trouvé
à la jeune mariée les signes de la virginité,
on la fera sortir à la porte de la maison de son père
et ses concitoyens la
lapideront jusqu'à ce que mort s'ensuive pour avoir commis une infamie. Si
on prend sur le fait un homme couchant avec une femme mariée,
tous deux mourront, l'homme qui a couché avec
la femme et la femme elle-même. Tu feras disparaître
d'lsraèl le mal. Si une jeune fille vierge est fiancée à un homme, qu'un autre homme la rencontre dans
la ville et couche avec elle, vous les conduirez tous deux jusqu'à
la porte de cette ville et vous les lapiderez jusqu'à ce que mort s'ensuivre. " (XXII. 20-24).
Cependant. le verset 15 de la sourate 4 fait
obligation d'avoir des témoins pour condamner les femmes
adultères : "Faites
témoigner contre elle, quatre
d'entre vous." De plus, le verset 2 de la sourate 24 impose la présence
de croyants à la punition pour en contrôler la régularité.
Gare aux dénonciateurs abusifs, les
peines contre eux sont énumérées dans les
versets 4 à 8 de la sourate 4 : "Et ceux qui lancent des accusations contre des
dames, puis ne produisent pas quatre témoins, fouettez-les
alors de quatre-vingts coups de lanières, et n'acceptez
plus jamais d'eux témoignage."
Ces restrictions sont à rapprocher de la célèbre
apostrophe de Jésus: "Que celui qui n'a jamais péché
lui lance la première pierre ! "
Quand les ayatollah iraniens font lapider
des femmes par la foule sous de vagues accusations d'adultère,
ils ont beau invoquer le Coran, ils sont bien loin de la vérité.
La lapidation,
en effet, n'est pas mentionnée dans le livre saint. C'est une tradition postérieure et fortement
critiquée par certains qui l'a établie. "Le Coran, affirme le docteur Draz, professeur à l'Université d'AI-Azhar et auteur de la "Morale du Coran", a entouré la législation
sur le péché de la chair de précautions
telles que l'établissement du crime devient très
difficile, sinon pratiquement impossible."
Il reste le délicat problème
des mutilations sexuelles
dont on a beaucoup parlé depuis
que l'organisation mondiale de la santé a organisé
sur ce sujet un colloque tenu à Khartoum en février
1979. Ce sont principalement les pratiques barbares de l'excision
(ablation du clitoris) et de
l'infibulation (couture de la vulve). Mais le Coran n'en parle pas. C'est seulement dans
un hadîth (voir la signification de ce terme
dans le texte ci-dessous qui lui est consacré) qu'on assure qu'un jour le Prophète a dit
à l'exciseuse Oum Attiya en train d'exercer son art sur
une jeune fille : "
Réduis, mais
ne détruis pas !"
Les exégètes les plus réactionnaires
se prévalent de ce texte pour faire admettre cette torture.
Les plus modernes, au contraire, font remarquer que le souci
de Mahomet était avant tout de rendre plus supportable
une pratique existant bien avant lui.
Le Coran n'est pas la seule "source de la Loi " (Oçoul al-liqh). Mahomet
ne se voulait pas l'auteur, mais le transcripteur de la volonté
de Dieu. Mais quand des points n'étaient pas clairs, dans
l'attente d'une révélation qui mettrait définitivement
fin aux intorprétahôns, il essayait de trouver lui-même
une expliçation.
"En
outre, même la
Révélation
fut divisée par Muhammad en deux catégories très
nettes", affirme Muhammad Hamidullah. De certains cas, il disait "C'est de Dieu écrivez-le et apprenez-le
par cur pour le réciter liturgiquement dans les
offices de prières" -
et c'est le Coran; des autres cas, il disait : " Faites-le"
ou même, sans rien dire, il le pratiquait lui-même
et n'en ordonnait pas ta codification. De là la différence
entre la Révélation
récitée (wahy matlou) et
la Révélation
non récitée (wahy ghaïr matlou). C'est cette dernière, ainsi que les récits
sur la pratique du Prophète en général (même
ses initiatives "privées") qu'on appelle indiftéremment
hadîth ou sunna.
"Hadîth signifie la parole et sunna signifie la conduite ou le comportement. Il
s'agit des deux à la fois, mais comme la langue arabe
ne possèdait pas un mot pour comprendre à la fois
la parole et le comportement de quelqu'un, on emploie ici les
deux termes dans le même sens."
Après la mort de Mahomet, les fidèles
demandaient souvent à ses compagnons de les éclairer
sur ce que pensait le Prophète sur tel ou tel point. C'est
l'origine des premiers hadîth. D'autres furent rédigés
plus tard, mais avec, comme garantie d'authenticité, les
noms des maillons de la chaîne sous la forme : " Untel a rapporté d'untel
qui le tenait d'untel, qui le tenait d'untel, etc."
Les premiers recueils de hadîth sont
perdus. Le plus ancien que l'on connaisse est celui de Hammâm ihn Munabbih (mort
en l'an 401 de l'Hégire, soit notre année 723) qui le tenait d'Abou-Huraira, compagnon
du Prophète. Mais selon des spécialistes, plus
de cent mille auditeurs de Mahomet auraient laissé des
témoignages. Ne serait-ce qu'à l'occasion de son
dernier pèlerinage, il se serait simultanément
adressé à cent quarante mille fidèles.
Cette anarchie dans les récits, jointe
au fait que de nombreux faux ont circulé très tôt,
a incité les docteurs de la loi à faire un examen
critique des recueils. Six d'entre eux ont reçu une sorte
d'imprimatur, ceux de Bokhan,
Muslim, Tirmidhî, Jasai, Ahou-Daoud et Ibn Mâja.
Certains critiques ont émis des doutes
sur la fidélîté des transmissions successives.
Or, après la Seconde
Guerre mondiale, on a retrouvé
les manuscrits des recueils de Hammâm, de Ma'mar et d'Abdar-Razzâc que l'on croyait perdus depuis longtemps. Un examen
attentif a permis de constater qu'ils contenaient les mêmes
hadîth que le recueil de Bokhan, bien postérieur.
Les auteurs musulmans n'ont d'ailleurs pas hésité
à faire preuve d'esprit critique. lis ont ainsi classé
les hadîth en deux catégories : d'une part les "authentiques" et les "assez
bons" d'autre part ceux dont
la chaîne est continue
et ceux dont elle est interrompue.
En revanche, les hadîth qui constituaient
une bid'a; c'est-a-dire une "innovation",
furent impitoyablement rejetés, au point que ce mot est
devenu pratiquement synonyme d'hérésie. Inversement, la sunna a pris le sens d'orthodoxie, d'où l'appellation de sunnites
donnée aux fidèles de stricte observance par opposition
aux chi'ites hérétiques ou à tout le moins schismatiques.
Remarque: Pour réduire le temps de chargement
nous n'avons pas présenté les illustrations accompagnant
ce dossier.
Article mis en page le 07/10/02, et revu le 06/05/04 et revu le 04/06/05.
IDYLLE Fred
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